Paris et l'étrange Ferragus

Paris. Séance de visionnage.
La femme du marché de Bissau
lui avait adressé pour finir un regard
direct et furtif, en 1/25ème de seconde.
Le temps d'une image.
Nemo reste suspendu à ce regard
qu'il n'avait pas eu
le temps d'apercevoir.
Il l'immobilise à présent sur écran
pour en prolonger la troublante intensité.


Tout à coup, dans la pièce voisine,
une mystérieuse Eurydice apparaît sur un des moniteurs
et lance un cri d'alerte prémonitoire... en vain.


Nemo retrouve bizarrement
le chat Guillaume-en-Egypte dans le salon
alors qu'il venait
de le quitter
dans la salle de montage.

Reste un instant perplexe.
Est-ce bien le même chat ?
Lui qui a l'habitude de douter
des images
du monde retransmises sur les écrans,
voilà qu'il se met à douter de la réalité.


Ce n'était pas le chat Guillaume
qui se trouvait dans la salle de montage,
mais Ferragus, trafiquant d'images,
qui vient de subtiliser quelques bobines...


avant de disparaître dans la nuit.


Une semaine plus tard,
Nemo retrouve ses images insérées
dans des reportages bidons
ou des publicités mensongères.
Images détournées,
vidées de leur sens.


Il retrouve aussi les images qu'il avait
tournées sur le petit peuple des statues.
Images dénaturées, censurées
ou réduites à des bibelots.
Maquillage d'autant plus néfaste que la
lucarne phosphorescente du petit écran,
pour les citadins aux logements réduits,
est la seule fenêtre ouverte sur le monde.